Retraites et travail: la conférence sociale entre dans le vif du sujet
La conférence Travail et retraites s'est ouverte vendredi avec pour ambition d'éclairer le débat public avant la présidentielle de 2027, au moment où le gouvernement bataille contre un possible rejet de son projet de budget de la Sécurité sociale par les députés.
"Si on veut avancer les retraites, il faut passer par la case travail", a déclaré le ministre du Travail Jean-Pierre Farandou en ouverture de cette conférence voulue par Sébastien Lecornu, moins de six mois après l'échec du conclave initié par son prédécesseur François Bayrou.
"Le Premier ministre avait bien prévu de venir mais l'actualité parlementaire est exigeante", a indiqué M. Farandou, ajoutant qu'il passerait au Conseil économique, social et environnemental (Cese), qui héberge la conférence, si les débats budgétaires à l'Assemblée le permettent.
Voulue par Sébastien Lecornu au moment de l'annonce de la suspension de la réforme des retraites, mesure inscrite dans le projet de budget de la Sécu (PLFSS), la conférence a été lancée il y a un mois par une réunion de méthode, lors de laquelle le Medef a claqué la porte.
La principale organisation patronale, très remontée contre les efforts demandés aux entreprises dans le projet de budget, a fait savoir qu'elle préférait s'en tenir à l'"agenda autonome" des partenaires sociaux, qui "n'est pas indexé sur des échéances politiques".
Le coordinateur de la conférence, l'ancien haut fonctionnaire Jean-Denis Combrexelle, a souligné que le gouvernement souhaitait qu'à l'avenir, "on puisse se retrouver dans une situation où le Medef pourra prendre toute sa part".
Les représentants des petites et moyennes entreprises, CPME et U2P étaient en revanche présents côté patronal vendredi, tout comme l'ensemble des organisations syndicales en dehors de Solidaires.
La CGT a décidé jeudi de participer, après avoir demandé des garanties au gouvernement sur l'ordre du jour.
Le Premier ministre s'est engagé à ce que l'objectif de la conférence "soit de renforcer, pérenniser, conforter notre système par répartition", a affirmé la secrétaire générale du syndicat, Sophie Binet.
- "fossé grandissant" -
"Ce que nous demandons, c'est que cette conférence puisse déboucher sur un ou des référendums pour que les Françaises et les Français puissent enfin voter, notamment en matière de retraite", a insisté Sophie Binet vendredi matin, sur France Info.
"Il y a un fossé grandissant entre le travail tel qu'il est imposé et le travail tel qu'il est vécu", a affirmé la secrétaire générale de la CFDT, Marylise Léon, dans le cadre du premier débat thématique de la journée, portant sur les mutations du monde du travail.
"Un pays qui prend le travail au sérieux, c'est un pays qui prend ses citoyens au sérieux, car la démocratie ne s'arrête pas aux portes de l'entreprise", a souligné la dirigeante du premier syndicat.
Depuis 40 ans, les politiques publiques ont "trop souvent privilégié les enjeux d'emploi au détriment de la question du travail, en se focalisant sur les chiffres" du marché du travail, a expliqué pour sa part le président du Cese Thierry Beaudet.
"Nous avons atteint la limite du supportable. Tant que nous n'aurons pas le courage de rouvrir le débat sur le financement du modèle social, nous ne revalorisons pas le travail lui-même", a estimé le président de la CPME, Amir Reza-Tofighi, dénonçant aussi un "niveau de complexité" des normes qui "est en train de devenir la hantise de tout entrepreneur qui veut embaucher".
Le président du syndicat des cadres CFE-CGC François Hommeril a loué un ministre du Travail "très engagé" et "très sincère", disant avoir "vraiment envie de jouer le jeu" de la conférence, tout en regrettant l'absence du Medef, qu'il "peine à comprendre".
L'après-midi, les questions d'emploi, notamment des jeunes et des seniors, ainsi que des liens entre le "virage démographique" et les retraites seront abordés.
Cette première conférence plénière, qui sera suivie de deux autres et d'ateliers mensuels jusqu'à l'été prochain, sera clôturée par Jean-Pierre Farandou et son homologue de la Fonction publique David Amiel.
(S.Perez--TAG)